En 2008, les archéologues allemands ont exhumé les vestiges d’un champ de bataille dans la forêt de Harzhorn, bataille ayant opposé les troupes romaines et germaniques au début du III ème siècle de notre ère. Le souvenir de cette bataille n’a jamais été signalé par les textes antiques.
Voir reportage sur la découverte (en allemand) ci dessus .
Cette découverte est exceptionnelle à plus d’un titre :
- tout d’abord la localisation du site, dans une zone reculée de la Germanie, que les historiens pensaient désertée par les romains depuis le désastre de Teutoburg en 9 après JC où trois légions et leurs trains de bagages furent massacrés par les tribus germaines en révolte, marquant un coup d’arrêt à la conquête de la Germanie.
- Ensuite la découverte d’un champ de bataille antique est exceptionnelle, car ces derniers ne révèlent généralement que peu de vestiges, l’ensemble des armements et pièces métalliques ayant généralement été récupérés par les vainqueurs .
Il semble que les profondeurs de Germanie aient fait l’objet, à défaut de conquêtes, d’expéditions punitives :
- Tout d’abord par Drusus, entre 12 et 11 après JC, pour venger l’humiliation de la bataille de Teutoburg, qui permit la récupération des aigles des légions massacrées
- Il semblerait que les Romains aient patienté plus de 200 ans avant d’envoyer nouvelle une expédition punitive contre les tribus germaniques les plus reculées. C’est l’empereur Maximin Ier le Thrace (173-238) qui aurait organisé ce raid en 235, dans le but de "pacifier" les régions du nord.
Les archéologues allemands ont exhumé les débris de la bataille sur une colline boisée appelée Harzhorn. Elle est localisée en Basse-Saxe, entre les villes de Kalefeld et de Bad Gandersheim, soit à 12 jours de marche de la résidence impériale à Mayence.
Les archéologues évaluent le champ de bataille à 1 km². Dans ce champ de bataille, ont été retrouvés 1800 artefacts de la bataille, qui permettent d’imaginer le déroulement la bataille.
La présence de vestiges de chariot, de piquet de tentes, des outils de terrassement... peut laisser supposer que la troupe romaine a été attaquée durant la marche, comme lors de la défaite de Teutoburg, alors que les légions étaient les plus vulnérables.
Bataille d'Harzhorn - Eléments de chariot (passe-guide en bronze) - photo © Christa S. Fuchs
Bataille d'Harzhorn - piquet en fer de tente de légionnaire (contubernium) © photo Christa S. Fuchs
Toutefois, les troupes ont pu s’organiser et mettre les pièces d’artillerie romaine (scorpions et chiroballistes) qui pouvaient tirer précisément à plus de 300 m , dont plusieurs centaines de pointes de flèches (de 200 gr) ont été retrouvées .
Bataille d'Harzhorn - Pointes de flèches d'artillerie romaine trouvés à plusieurs centaines d'exemplaires © photo Christa S. Fuchs
Des troupes auxilaires, composées d' archers orientaux et de vélites numides (infanterie légère de harcèlement issue d'Afrique du Nord) ont également été mis en œuvre. La répartition des clous de sandales légionnaires retrouvées sur le site laissent penser que ces derniers ont poursuivis les germains jusqu’au sommet de la colline.
Les premières minutes du film Gladiator évoque les premiers instants d' une telle bataille.
Hazorn - Deux têtes de pila- photo licence creative common Axel Hindemith
Fragments d'une cotte de maille découverts en 2013 après leur découverte: l'ensemble des fragments retrouvés devrait permettre de reconstituer l'ensemble de la protection individuelle : ce genre de découverte sur un champ de bataille est exceptionnel ce type d'armure était extremement précieux et récupérés après la bataille : comment sont-ils parvenus jusqu'à nous? Cette cotte de maille appartenait à un legionnaire blessé qui s'en est séparé? Toute les hypothèses sont possibles ...
Détail des anneaux de la cotte de maille (Lorica Hamata) après restauration: des mailles de 6 mm environ,plates et rivetées, constituant une protection individuelle très efficace. photo Christa S. Fuchs.
La nature des vestiges laissent à penser que les légions romaines ont remportées la victoire, bien que non mentionnée par les textes.
Parmi les vestiges retrouvés, on retrouve des lances germaines décorées, des plaques de ceinturon, des hyposandales , un éperon, les restes d’un cheval tombé dans un trou, l’extrémité du fourreau d’un glaive typique du III ème siècle, des pièces de monnaies frappés à l’effigie de différents empereurs romains ( Caracalla : 211-217, Elagabal 218-222, Sévère Alexandre 223-235).
Bataille de Harzhorn - extrémité de fourreau de glaive romain © photo Christa S. Fuchs
Reconstitution d'une troupe romaine du III eme siècle dans la forêt de Harzhorn - photo Heiner Muller Elsner
Légionnaires romains du début du III ème siècle - Dessin de Jonnhy Shumate, avec son aimble autorisation
Fin 2011, une dolabra, hache du légionnaire, appartenant à un soldat de la légion IV flavia felix vient d’être découverte.
Bataille de Harzhorn - Hache d'un légionnaire (Dolabra) de la Légion IV Flavia felix -photo DPA)
Photo Th. Deushmann
Au début du III ème siècle cette légion basée en Mésie (province danubienne) à plusieurs milliers de km au sud du champ de bataille .
Toutefois une inscription sur une stèle à de Speyer sur le Rhin moyen datant du début IIIème siècle , ainsi que cette nouvelle découverte permet d’envisager qu’un détachement de cette légion fut associée aux expéditions contre les Alamans des empereurs Caracalla (213 ap JC) , Alexandre Severe (235) puis Thrax maximin (235-236).